Lorsque vous ou votre client choisissez un exécuteur testamentaire (ou un liquidateur au Québec), ou lorsque votre client décide d’agir en tant qu’exécuteur testamentaire ou liquidateur, il est important de tenir compte des fonctions et responsabilités que cela implique, et de savoir si vous ou la personne que vous envisagez avez la capacité et le désir de remplir ces fonctions. Cette décision se complique lorsque les actifs en question comprennent des actifs commerciaux ou des actifs situés dans d’autres provinces ou territoires.
Outre les obligations administratives dont nous parlerons ci-dessous, un exécuteur testamentaire est un fiduciaire qui a le devoir moral et éthique d’agir honnêtement, raisonnablement et dans l’intérêt des bénéficiaires. L’exécuteur testamentaire détient la succession « en fiducie » pour les bénéficiaires et il doit être impartial, éviter les conflits d’intérêts, ne pas confondre les biens de la succession avec les siens et ne pas utiliser les biens de la succession à titre personnel. En règle générale, on attend d’un exécuteur testamentaire qu’il procède à l’administration d’une succession dans un délai d’un an (souvent appelé l’« année de l’exécuteur »), mais cela peut ne pas être possible dans le cas de successions complexes ou soumises à des litiges.
Un exécuteur testamentaire peut être rémunéré, et le montant en question pourrait être indiqué dans le testament; en l’absence d’une clause de rémunération dans le testament, la rémunération de l’exécuteur testamentaire peut tout de même être versée, mais elle peut nécessiter l’approbation du tribunal. Si une société de fiducie est choisie en tant qu’exécuteur testamentaire, des frais seront généralement facturés sur la base d’une convention d’honoraires préparée au moment de l’exécution du testament. Les sociétés de fiducie représentent une bonne option pour les successions complexes et celles qui peuvent se poursuivre pendant plusieurs années.
Les fonctions de l’exécuteur testamentaire
Quelles sont donc les principales fonctions de l’exécuteur testamentaire? Bien que la liste suivante ne soit pas exhaustive, en voici quelques-unes :
- Localisation du testament
- Organisation des funérailles
- Homologation du testament
- Localisation des bénéficiaires
- Détermination de tous les biens de la succession et préservation de ces derniers jusqu’à leur vente ou leur distribution aux bénéficiaires
- Détermination du passif du défunt (connu et potentiel)
- Production des déclarations de revenus et distribution des legs
Examinons brièvement quelques points à prendre en compte pour chacune de ces fonctions :
Localisation du testament. Bien souvent, le testament est conservé par l’avocat qui l’a préparé, mais il arrive que le client le conserve. Si tel est le cas, il est à espérer que le défunt a informé l’exécuteur testamentaire de son emplacement – peut-être un coffre-fort ou un classeur dans la maison du défunt, ou peut-être un coffret de sûreté (ce qui pourrait causer des problèmes, puisque l’institution financière peut exiger un testament homologué pour accorder l’autorisation d’accéder au coffret de sûreté).
Funérailles. L’exécuteur testamentaire doit examiner le testament ou une éventuelle lettre de desiderata afin de déterminer si des préarrangements funéraires ont déjà été pris ou s’il y a des instructions particulières. Les funérailles relèvent de la responsabilité de l’exécuteur testamentaire, qui doit veiller à ce que les frais funéraires soient payés, même s’il ne fait pas partie de la famille et que c’est probablement cette dernière qui dirigera la planification. Si l’exécuteur testamentaire n’a pas encore accès aux comptes bancaires de la succession du défunt, il peut parfois obtenir les fonds nécessaires auprès d’un bénéficiaire ou payer lui-même le montant et se faire rembourser plus tard par la succession (ou parfois par la prestation de décès du Régime de pensions du Canada).
Frais d’homologation. La plupart des provinces appliquent des frais d’homologation sous une forme ou une autre. Des formulaires provinciaux doivent être remplis et il est souvent nécessaire de solliciter des conseils juridiques pour obtenir une homologation. L’homologation est nécessaire afin de prouver que l’exécuteur testamentaire a le pouvoir de gérer les actifs de la succession. Les frais d’homologation et la législation varient selon les provinces. Dans certaines provinces, on a recours aux testaments multiples pour réduire les frais d’homologation en séparant les biens qui doivent être homologués (comme les fonds de placement non enregistrés et les dépôts bancaires) de ceux qui n’ont pas besoin de l’être (comme les actions de sociétés privées). Cette stratégie est le plus souvent utilisée en Colombie-Britannique et en Ontario. Certains actifs ne sont pas soumis à l’homologation, parce qu’ils ne sont pas transmis à la succession. Ces actifs comprennent les sommes au titre d’une police d’assurance vie ou d’un régime enregistré versées à un bénéficiaire désigné et les biens détenus en commun qui sont transmis par droit de survie. Pour obtenir un résumé des règles d’homologation qui s’appliquent dans chaque province, consultez la question 10 relative à la province en question dans le Guide de référence sur le droit provincial des testaments et des successions au Canada de PPI.
Localisation des bénéficiaires et communication avec eux. La localisation des bénéficiaires devrait en général être simple, surtout si un ou plusieurs membres de la famille agissent en tant qu’exécuteurs testamentaires. Elle peut toutefois être difficile dans certains cas, notamment lorsqu’il y a des mineurs, qui sont dépourvus de capacité juridique, des non-résidents ou des enfants de parents non mariés qui peuvent ne pas être connus des autres membres de la famille. Il y a des obligations fiduciaires à respecter à l’égard des bénéficiaires, de sorte que ces derniers peuvent contester les actions et les honoraires d’un exécuteur testamentaire. Des conflits entre bénéficiaires peuvent survenir, ce qui peut placer l’exécuteur testamentaire dans une position difficile et, parfois, au cœur d’un litige. Il est recommandé de mettre en place une communication régulière et continue avec les bénéficiaires pour éviter les questions et les problèmes futurs.
Détermination des actifs. Cette tâche peut être la plus chronophage. En règle générale, l’actif le plus important de la succession est la maison du défunt. À moins que la maison n’ait été transmise par droit de survie, le travail de l’exécuteur testamentaire consiste à assurer la sécurité de la maison et de son contenu. En général, cela signifie qu’il faut dresser un inventaire du contenu, s’assurer que l’assurance des biens est adéquate et éventuellement changer les serrures. L’exécuteur doit trouver les renseignements bancaires et informer les banques et autres institutions financières du décès, ce qui signifie généralement fournir un testament homologué et un certificat de décès.
L’exécuteur testamentaire peut également devoir vérifier les actifs numériques du défunt, ce qui peut nécessiter de trouver les mots de passe! Pour en savoir plus sur les actifs numériques et leur nature, nous vous suggérons de lire l’article Protéger les biens numériques de votre client et de regarder cette courte vidéo de la série SMART TALK sur les biens numériques.
Si le défunt possédait des actifs commerciaux, alors il semblerait que la tâche de l’exécuteur testamentaire se complique. Il est à espérer que le défunt avait mis en place un plan successoral pour l’entreprise. Dans ce cas, l’exécuteur testamentaire doit consulter les conseillers professionnels du défunt au sujet du plan, et discuter également d’une éventuelle planification fiscale post-mortem. Dans le cas contraire, l’exécuteur testamentaire devra mettre en œuvre un plan de gestion des intérêts commerciaux dès que possible. Il sera primordial d’obtenir l’avis de conseillers professionnels.
Détermination des dettes. Il faut retrouver les anciennes déclarations de revenus du défunt pour déterminer ce qui a été fait et s’il reste des impôts impayés. L’Agence du revenu du Canada propose des ressources utiles, notamment les pages Quoi faire suivant un décès et Que faire lorsqu’une personne est décédée. En outre, l’exécuteur testamentaire devrait consulter des conseillers fiscaux au sujet de la planification post-mortem, du statut de succession assujettie à l’imposition à taux progressifs et de la production de déclarations supplémentaires pour la dernière année. Il faut également déterminer les autres dettes connues, comme les prêts hypothécaires, les billets à ordre, les dettes funéraires, etc. L’exécuteur testamentaire doit vérifier la présence de passifs éventuels, comme les demandes en droit de la famille. Si un exécuteur testamentaire ne paie pas les dettes connues, il en sera personnellement responsable; il serait donc prudent qu’il se fasse connaître afin d’aviser les créanciers potentiels.
Distribution des biens de la succession. Le testament du défunt contiendra parfois des legs aux bénéficiaires, après quoi le reliquat sera distribué aux bénéficiaires résiduels. Parfois, les actifs sont laissés en fiducie pour les bénéficiaires et l’exécuteur testamentaire peut être le fiduciaire de ces fiducies en cours ou d’autres personnes peuvent être nommées comme fiduciaires.
La présence d’actifs immobilisés et non immobilisés peut entraîner des conflits entre bénéficiaires. L’exécuteur testamentaire peut être amené à liquider certains actifs afin de les répartir entre les bénéficiaires. Pour ce qui est des biens personnels, il est à espérer que le testament du défunt décrive la manière dont ils doivent être répartis. Dans le cas contraire, l’exécuteur testamentaire devra déterminer une procédure permettant aux bénéficiaires de réclamer des biens personnels : c’est souvent le processus le plus chargé émotionnellement et des litiges éclatent souvent entre les bénéficiaires – l’exécuteur testamentaire doit être prêt à les gérer. Avant de procéder à la distribution finale des biens de la succession, l’exécuteur testamentaire doit obtenir un certificat de décharge fiscale de l’Agence du revenu du Canada (et de Revenu Québec). Ce certificat garantit que l’exécuteur testamentaire n’est pas personnellement responsable d’un éventuel impôt ou autre montant impayé en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (ou de la Loi sur les impôts du Québec). En outre, l’exécuteur testamentaire doit obtenir une décharge écrite des bénéficiaires indiquant qu’ils ont reçu l’intégralité de leur part de la succession. Dans certains cas, il est nécessaire d’obtenir une approbation de comptes auprès du tribunal afin d’approuver la répartition des biens de la succession et la rémunération de l’exécuteur testamentaire. Une fois encore, il convient d’obtenir un avis juridique.
L’engagement d’un exécuteur testamentaire
Être nommé exécuteur testamentaire est en fait un privilège et témoigne du grand respect et de la confiance qu’une personne a en votre client et en sa capacité à accomplir ses dernières volontés. Cette nomination s’accompagne également de nombreuses responsabilités, elle peut être épuisante sur le plan émotionnel et, comme le montrent les fonctions décrites ci-dessus, elle peut représenter pour votre client un investissement en temps considérable. Pour les successions plus petites ou plus simples, dans le cadre desquelles les membres de la famille sont les exécuteurs testamentaires et les bénéficiaires, le rôle de l’exécuteur testamentaire peut ne pas être aussi complexe ou long, mais même dans le cas de successions plus petites, l’émotion suscitée par la répartition de certains biens peut être forte. La communication entre l’exécuteur testamentaire proposé et la personne qui prépare son testament est importante pour que les souhaits du testateur soient bien compris. De même, il est recommandé de mettre en place une communication avec les bénéficiaires pendant la phase de planification pour réduire les désaccords potentiels après le décès. Et bien sûr, il est primordial de consulter un professionnel pour obtenir des conseils.