Un article de l’équipe des Services de planification de PPI, composée d’avocats, de comptables et d’actuaires qui fournissent un soutien en matière de planification fiscale et successorale aux conseillers affiliés à PPI.
L’imposition des transferts intergénérationnels au Canada a fait l’objet d’une attention particulière au cours des dernières années. Le projet de loi C-208, projet de loi d’initiative parlementaire, proposait d’apporter des modifications à l’article 84.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu afin que certains transferts intergénérationnels soient exemptés de cette disposition anti-évitement (la règle anti-évitement vise à empêcher qu’une société ne soit dépouillée de son excédent sous la forme d’un remboursement de capital en franchise d’impôt plutôt que sous la forme d’un dividende imposable). Les modifications proposées dans le projet de loi C-208 sont entrées en vigueur en juin 2021, mais le ministère des Finances craignait que les règles soient interprétées trop largement et que cela donne lieu à des abus. Le ministère des Finances a annoncé des révisions de ces règles dans le budget fédéral de 2023, qui sont plus restrictives que les propositions initiales du projet de loi C-208 et qui figurent dans l’avant-projet de loi du 4 août 2023. Les règles révisées entrent en vigueur le 1er janvier 2024, de sorte que la fenêtre de planification se réduit pour les cas dans lesquels il peut être judicieux d’appliquer les règles existantes.*
Avant de discuter des options de planification dans ce contexte changeant, examinons les raisons pour lesquelles le projet de loi C-208 a été jugé nécessaire.
Projet de loi C-208 – Pourquoi a-t-il été adopté?
Dans certaines conditions, les règles anti-évitement prévues à l’article 84.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu permettent de convertir un gain en capital imposable en dividendes imposables dans des situations de lien de dépendance. En règle générale, l’article 84.1 s’applique lorsqu’un contribuable résidant au Canada (qui n’est pas une société) transfère des actions d’une société canadienne à une autre société avec laquelle il a un lien de dépendance. Ces règles sont désavantageuses puisque les taux d’imposition actuels des dividendes sont plus élevés que ceux des gains en capital. Par ailleurs, l’exonération des gains en capital accordée aux actions admissibles de petite entreprise et celle visant les biens agricoles ou de pêche admissibles ne seraient pas disponibles (ces exonérations pour 2023 s’élèvent respectivement à 971 190 $ et à 1 000 000 $). Cette disposition a, par conséquent, contrecarré le transfert d’entreprises familiales à la génération suivante lorsque l’entreprise était vendue à la société d’un enfant et a rendu plus avantageuse, d’un point de vue fiscal, la vente de l’entreprise familiale à un tiers sans lien de dépendance.
Les révisions annoncées dans le budget fédéral de 2023 visent à répondre à la préoccupation selon laquelle l’exonération prévue à l’article 84.1 ne devrait s’appliquer qu’en cas de « véritable » transfert intergénérationnel. Les règles conservent les exigences initiales selon lesquelles les actions doivent être celles d’une petite entreprise admissible ou d’une société agricole ou de pêche admissible et la société acheteuse doit être contrôlée par un ou plusieurs enfants du cédant. Ces révisions répondent aux préoccupations soulevées par le ministère des Finances concernant le transfert du contrôle, de la gestion et des intérêts économiques à la génération suivante à l’intérieur de certains délais. Lorsque vous envisagez cette planification, n’oubliez pas qu’il existe une définition élargie du terme « enfant » (qui peut par exemple inclure les petits-enfants) qu’il convient d’examiner avant d’entreprendre la planification.
Options de transfert de l’entreprise familiale proposées dans le budget fédéral de 2023
Deux options de transfert sont proposées : le transfert immédiat et le transfert progressif. Comme son nom l’indique, l’option de transfert progressif permet d’accorder un délai plus long pour le transfert du contrôle et de la gestion de l’entreprise à la génération suivante.
Dans le cas de l’option de transfert immédiat, le parent doit transférer immédiatement le contrôle de droit et de fait à l’enfant adulte, et le solde des actions avec droit de vote et des actions ordinaires doit être transféré dans les 36 mois. De plus, l’enfant adulte doit prendre la direction de l’entreprise dans les 36 mois et doit conserver le contrôle de droit et travailler dans l’entreprise pendant les 36 mois qui suivent le transfert des actions.
En revanche, l’option de transfert progressif n’exige que le transfert immédiat du contrôle de droit, le solde des actions avec droit de vote et des actions ordinaires devant être transféré dans les 36 mois. Elle prévoit en outre que, dans les dix ans suivant le transfert, le parent réduise la valeur de ses dettes et de ses participations dans l’entreprise à 30 % de la valeur de toutes ses participations au moment de la vente (50 % dans le cas d’une société agricole ou de pêche familiale). L’enfant adulte doit prendre la direction de l’entreprise dans les 36 mois et doit conserver le contrôle de droit et travailler dans l’entreprise pendant les 60 mois qui suivent le transfert.
Dans les deux cas, la période de nouvelle cotisation est prolongée. Dans le cas d’un transfert immédiat, la période de nouvelle cotisation est prolongée de 3 ans, tandis que dans le cas d’un transfert progressif, elle est prolongée de 10 ans. La prolongation de la période au cours de laquelle l’ARC peut établir une nouvelle cotisation doit être examinée avec soin. D’autres aspects de ces règles doivent être analysés avant de procéder à une quelconque planification.
Transfert de l’entreprise familiale : faut-il se prévaloir des règles existantes (d’ici au 31 décembre 2023!), attendre l’entrée en vigueur des nouvelles règles ou choisir une autre option?
Les propriétaires d’une entreprise familiale qui souhaitent transmettre leur entreprise à la génération suivante doivent se demander s’ils souhaitent planifier ce transfert en vertu des règles révisées, en vertu des règles initiales (d’ici au 31 décembre 2023) qui sont moins restrictives, ou selon d’autres options de planification. La question clé est de savoir dans combien de temps le propriétaire souhaite abandonner la gestion et le contrôle.
- Les nouvelles règles (qui entreront en vigueur le 1erjanvier 2024) prévoient deux options
- Si le transfert du contrôle de droit et de fait n’est pas une préoccupation pour le propriétaire, les nouvelles règles de transfert immédiat contribuent alors à ce que le plan de succession soit efficace sur le plan fiscal.
- Si le transfert du contrôle de fait pose problème, la nouvelle option de transfert progressif devrait être envisagée en gardant à l’esprit que les dettes et les participations (actions privilégiées) doivent faire l’objet d’une réduction dans un délai de dix ans, et que la période de nouvelle cotisation sera plus longue de même que la période pendant laquelle l’enfant doit travailler dans l’entreprise.
- Se prévaloir des règles existantes d’ici au 31 décembre 2023 – Si le propriétaire n’est pas prêt à céder le contrôle, il peut planifier de se conformer aux dispositions moins restrictives du projet de loi C-208, qui sont en vigueur jusqu’au 31 décembre 2023. Sachez que le temps presse pour utiliser cette option! Si cette option est envisagée, n’oubliez pas que l’intention de transférer l’entreprise doit être réelle, car le ministère des Finances et l’ARC ont déclaré qu’ils examineraient les transactions qui ne respectent pas l’esprit des règles.*
- Autres options de planification – Si le propriétaire souhaite transférer progressivement l’entreprise, il peut envisager la cession en garantie d’une police d’assurance vie afin qu’un enfant adulte puisse emprunter des fonds pour acheter personnellement les actions.
L’assurance vie comme solution de remplacement
Examinons la solution de remplacement que peut constituer l’assurance vie mentionnée ci-dessus dans le dernier point. Les modifications apportées à l’article 84.1 rendent les transferts entre générations plus efficaces sur le plan fiscal. Toutefois, les règles sont complexes et il peut arriver que le parent ne souhaite pas transférer entièrement le contrôle de la société et qu’il veuille continuer à participer aux activités de l’entreprise plus longtemps que les révisions proposées à l’article 84.1 ne le permettent. Dans ces situations, l’assurance vie peut être un outil précieux pour financer le rachat du parent. Cette stratégie consiste à utiliser une assurance sur la vie du parent ou des parents, détenue par la société de portefeuille de l’enfant, en garantie d’un prêt personnel accordé à l’enfant. L’enfant pourrait utiliser le prêt pour se porter acquéreur d’une partie des actions du parent (par exemple, un volume égal à l’exonération du gain en capital d’actions admissibles de petite entreprise [AAPE]). Il se peut qu’un gel successoral soit proposé pour faciliter cette planification. Les dispositions de l’article 84.1 ne devraient pas s’appliquer puisque l’enfant effectue personnellement l’achat des actions du parent et non la société de portefeuille de celui-ci. PPI a une stratégie technique (TS-130 – Exemption pour gains en capital et planification successorale familiale) qui traite de cette idée de planification. Toutefois, les révisions proposées aux règles de l’impôt minimum de remplacement (IMR) devraient être examinées avec les conseillers professionnels de l’enfant, étant donné que les intérêts payés sur le prêt seraient un élément de traitement fiscal préférentiel dont 50 % devraient être rajoutés lors du calcul de l’IMR.
Communiquez avec le centre de collaboration PPI de votre région pour en savoir plus.
*Ce n’est pas le cas dans la province de Québec où les règles actuelles sont plus restrictives. Toutefois, le 1er janvier 2024, le Québec harmonisera ses règles provinciales avec les nouvelles règles fédérales.
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